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Attendu comme le messie, annoncé à grand renfort d’affiches de cinéma nous promettant une ambiance de film noir, L.A. version Noire était « the place to be » ces derniers jours. Le voyage valait-il la peine?

Oh, des vrais visages dans un jeu vidéo?

La première chose qui frappe le joueur, la première, avant même le jeu ou le gameplay, se sont, bien sûr, les visages. Parfaitement rendus, parfaitement animés, la motion capture est à son paroxysme (enfin peut-être pas, peut-être que demain, ce sera mieux, mais aujourd’hui, c’est le top). Mais, par second effet kiss kool, la seconde chose qui peut également frapper le joueur, c’est le décalage entre les visages ultra soignés et l’animation du reste des corps: oui, votre héros aura toujours des moufles quand il se servira de ses mains, et toujours des raideurs mal placées quand il devra courir et sauter des haies. Ce n’est pas très grave, mais c’est quand même dommage, car la quasi-perfection des visages fait ressortir encore plus le fait qu’on ne soit pas encore très au point sur l’animation des corps. (et la texture des cheveux)

Bonjour, j'ai une belle gueule, mais j'ai des moufles

Le reste du jeu, la ville, les voitures, les décors, sont plutôt bien fichus et assez agréables à regarder, même si le clipping est parfois un peu à la ramasse concernant les pots de fleurs, feux rouges et autres bancs publics, ce qui n’est pas vraiment gênant, mais vaguement ridicule.

Une prise en main aisée, mais un ensemble perfectible

Pour le reste, le jeu se prend en main assez facilement, que ce soit l’exploration des scènes de crime, la conduite ou la course à pied. Certains pourront cependant trouver que les voitures ne sont parfois pas très maniables, rendant quelques trajets ou courses poursuites un peu hasardeuses, et que le héros, parfois, est bien peu obéissant, refusant de sauter une barrière ou loupant un escalier de secours, ou nécessitant le spammage de la touche action pour qu’il daigne ouvrir une porte ou ramasser un objet.

L’attribution de certains boutons sur la PS3 n’aide pas trop: la sirène-klaxon sur le joystick qui dirige la voiture, c’est le meilleur moyen pour se faire peur tout seul au sortir d’un virage, et la même touche pour courir et pour tirer peut donner du grand n’importe quoi lors des fusillades.

Nos amis les PNJ maintenant, défient parfois l’entendement, à tel point qu’on ne sait s’il s’agit d’un bug ou d’une IA plus que défaillante: votre partenaire qui vous coince dans un coin, le coquin, et n’a pas l’idée de reculer pour vous laisser sortir, votre partenaire qui se suicide en se jetant sous vos roues (le game-over le plus ridicule du jeu, cela dit en passant), votre partenaire (encore lui!!) qui prend systématiquement le chemin le plus long pour vous rejoindre, les piétons qui, lorsque vous activez la sirène, se jettent en direction de votre voiture et non dans la direction opposée (la panique fait perdre ses moyens, certes, mais là, quand même…)

Heureusement, en fusillade, tout va bien, personne ne se jette sur votre canon, et personne ne vous tire dessus par erreur. Ouf.

Le jeu en lui-même alterne différentes phases: inspecter un lieu de crime, courir un peu partout mener l’enquête, interroger des suspects ou des témoins, courir après ces derniers quand ils sont récalcitrants, à pieds ou en voiture, ou encore répondre à des appels radio pour filer un coup de main et arrêter un braquage ou une prise d’otages, par exemple.

Conduire correctement un interrogatoire, répondre à un appel radio, permet de gagner des points d’expérience et donc, de monter en niveau. Et gagner des niveaux débloque des tenues (wouuuh), des voitures cachées (re-wouuuh), mais, surtout, nous offre des points d’intuition, qui, judicieusement utilisés, facilitent grandement une recherche d’indices ou un interrogatoire.

Et le tout occupe pendant facilement une vingtaine d’heures, bien plus si l’on parcourt la ville de long en large pour trouver tout ce qu’il y a à trouver, et encore plus si l’on rejoue les enquêtes pour atteindre le score parfait de 5 étoiles.

Trouver tous les indices ne demande pas  d’être un génie, juste d’être patient, puisqu’une petite musique (que l’on peut désactiver dans les options) permet de savoir si on a tout trouvé. Donc, tant que la musique joue, faut continuer de chercher… Les scènes de crime sont d’ailleurs assez réussies, on y trouve de tout, du vieux chapeau moisi dans une poubelle aux bouteilles de bières, en passant par les vieux outils qui trainent de façon plutôt réaliste.

Mais qu'est-ce qu'on a là?

Lorsqu’on est confronté à un témoin, ou à un suspect, les choses se corsent un peu: on doit décider, selon la tête qu’il fait, s’il ment, s’il dit la vérité, ou s’il ne nous dit pas tout. Et s’il ment, on doit, bien sûr, lui coller la preuve sous le nez. Sur le papier, ça parait cool, dans les faits, ça l’est bien moins, les expressions étant tout de même assez caricaturales. Si ça peut passer pour la mamie du troisième qui cache qu’elle cultive en fraude de l’herbe à chat, ça passe moins quand on interroge des suspects ayant des casiers judiciaires déjà chargés…

Enfin, les appels radio vous permettent de faire de petites missions hors enquête principale, et le principe est fort simple: vous répondez à l’appel, vous vous rendez sur les lieux, et, la plupart du temps, il s’agit de mettre un terme à une fusillade ou de rattraper un voleur en fuite. Rien de bien transcendant, en somme.

Si les fans de GTA et donc, de GTA-like, ne seront pas déçus, les autres ne pourront s’empêcher de trouver tout ceci un poil, voire, une mèche, voire, une chevelure entière, répéti-tif… Et donc ennuyeux, voire très ennuyeux.

Heureusement, les enquêtes peuvent se conclure de différentes façons, le jouer n’est pas obligé de trouver tous les indices pour les boucler. Et en ne trouvant pas tous les indices, toutes les questions à poser ne sont pas accessibles. Vous pouvez donc vous retrouver à ne vous baser que sur votre intime conviction pour condamner un suspect, si vous n’avez pas en main l’indice qui prouve (ou non) qu’il est coupable.

Cependant, on a pas non plus une liberté folle, car l’histoire nous rattrape vite et peut parfois donner l’impression que, quoi qu’on fasse ou décide, il se passera la même chose, ce qui est frustrant, quand on mène une enquête.

Liberté qui manque aussi lors des courses poursuites, qui sont scriptées. A nouveau, cela ne gênera en rien les adeptes de GTA, les autres trouveront ça dommage et manquant de saveur, l’ennui arrivant dès lors bien vite.

Le seul moment où le joueur est vraiment libre, c’est lorsqu’il s’agit d’explorer Los Angeles pour récupérer des objets cachés (voitures, films). Alors certes, la ville est jolie, mais on aurait aimé un peu plus de liberté ailleurs aussi.

On est pas bien sous le soleil de L.A ?

D’ailleurs, les scripts posent quand même quelques problèmes: vous prenez le temps d’aller vous récupérer une super voiture de la mortkitue, qui est maniable, classe, vous larguez votre partenaire à l’autre bout de la ville, et après une cut-scène, vous vous retrouver dans votre poubelle habituelle, avec votre partenaire à vos côtés. Question immersion et crédibilité, on a fait beaucoup mieux.

Et d’ailleurs, si l’on vient à parler d’immersion et de crédibilité…

L’ambiance Noire, elle l’a, elle l’a pas?

Des efforts ont été faits du point de vue des visages, c’est sûr. De l’histoire, c’est certain. De la mise en scène de cette histoire, aussi. Mais au final, le résultat n’est peut-être pas tout à fait à la hauteur de ce qui était annoncé par ces sublimes affiches que l’on voyait partout.

Le héros a, à mon sens, un charisme de moule trop cuite, malgré l’histoire qui se met en place. On nous livre des détails de nulle part sur lui après avoir passé dix, quinze heures de jeu à ne rien savoir. On nous assomme de flashback régulièrement, et leur importance ne se comprend que bien trop tard pour ne pas les trouver sans intérêt pendant une bonne partie du jeu.

La trame principale (car oui, il y a une trame principale haha) subit le même sort: on la subodore (parce que les joueurs ne sont pas idiots, quand même), mais elle est maltraitée, on en révèle pas assez pendant vingt heures pour en livrer bien trop d’un coup, genre « bon les gars, le jeu est presque fini, faudrait ptête balancer la sauce ». C’est dommage, car ça parait du coup superficiel, alors que le potentiel était là.
De même pour l’ambiance. Ce ne sont pas les trois lignes de dialogues de nos partenaires qui vont y contribuer. Pour insulter les suspects, y a du monde (c’est du propre tiens), mais pour le reste… On se sent souvent un peu seul.

Ça manque d’ambiance aussi dans les enquêtes: peu de contexte, donc, au final, peu d’implication de la part de l’enquêteur. Le but est clairement de ramasser des preuves pour condamner des suspects, fin de l’histoire, et on se fiche de la psychologie des suspects et des victimes.

Et puis tiens, les suspects, tant qu’on en parle, leurs expressions faciales vous indiquent s’ils sont mal à l’aise ou pas. Donc, s’ils cachent des choses ou pas. Oui, sauf que les suspects ont, en tout et pour tout, trois expressions, surjouées de surcroit. 400 acteurs pendant 4 ans pour trois expressions surjouées? Pour des dialogues sans trop de saveur? Pour un héros qui donne l’impression de crier sans arrêt même quand il pourrait parler normalement?

Oui, je suis un témoin, et je surjoue

Et en plus, même pas une version française doublée, mais juste des sous-titres? (certains trouveront peut-être que ce dernier point un peu too much. Mais tout le monde ne parle pas anglais, et passer quarante heures à lire des sous-titres, ça peut être un peu pénible.)

Finalement, l’ambiance, l’histoire, l’immersion n’arrivent vraiment que dans les quatre dernières heures de jeu. Là, on est à L.A à la fin des années 40. Là, on profite des courses poursuites. Là, on a vraiment envie de savoir qui a fait quoi, quand, comment et pourquoi. Là, il se passe quelque chose entre le joueur et les protagonistes. Enfin. Enfiiiin. Mais autant d’ennui pour quelques heures de bonheur, c’est rageant.

Heureusement, la musique est là. La bande son, pour le coup, est vraiment réussie, même si parfois un peu répétitive, mais elle arrive un peu à pallier au manque d’ambiance par ailleurs.

De la fumée, des Jazzmen black... Ouais, c'est bien les années 40.

Au final, ceux qui apprécient GTA aimeront sûrement L.A. Noire, qui n’est pas mauvais, mais ne casse pas non plus cinq pattes à un ornithorynque. Ceux qui réussiront à accrocher au personnage-joueur et à ses différents partenaires malgré la superficialité de l’histoire au début du jeu devraient aussi prendre pas mal de plaisir, il y a tous les ingrédients pour: une ville superbe, des courses poursuites haletantes (si on a rien contre les voitures parfois montées sur savonnettes), des poursuites de suspects musclées (si on a rien contre les scripts et les héros récalcitrants aux commandes), des interrogatoires tirés de films policiers (si on a rien contre les caricatures et les expressions faciales surjouées)… Mais hélas, rien de révolutionnaire, une histoire maladroitement amenée, une mise en scène perfectible, des enquêtes répétitives, ceux qui attendaient un jeu avec de vrais enquêtes, de vrais choix, une vraie ambiance immersive avec une histoire soignée seront déçus, et passeront le plus clair du jeu à s’ennuyer ferme.

Reste la modélisation des visages, mais la prouesse technique ne fait pas tout.

Sources des images : L.A. Noire le site officiel

Tags : L.A. NoireRockstar GamesTeam Bondy
Aurigabi

Gentle Geek Aurigabi

Fille de Mary Poppins et Xena la Guerrière, aime se promener dans les bois pluvieux. Avec une console. Ou un comics. Avant que les cylons n’arrivent…

4 commentaires

  1. un test avec lequel je ne suis pas du tout d’accord.

    « Oui, sauf que les suspects ont, en tout et pour tout, trois expressions, surjouées de surcroit. 400 acteurs pendant 4 ans pour trois expressions surjouées? Pour des dialogues sans trop de saveur? »
    ??? t’as joué au jeu en étant déf toi nan ??

    bref je ne vais pas relever tous les points qui sont faux dans le test, mais il y en a beaucoup. Ce n’est même pas une question de point de vue, c’est juste que c’est faux…

    que le jeu soit décevant je peux le comprendre, pas mal de trucs m’ont déçu aussi, mais si on veut jouer au journaliste, on reste objectif, même quand ça nous plait pas…

  2. Bien sur, j’adore jouer déchirée aux jeux vidéo, c’est tellement mieux.

    Si pas mal de trucs t’ont déçu aussi, tu dois être d’accord avec la conclusion, à savoir qu’il est décevant et qu’il ne plaira pas à tout le monde…

  3. Je ne suis peut-être pas forcément d’accord avec tout (mais on ne peut pas tous avoir la même expérience de jeu… en tant que fan de GTA, le gameplay pour les courses poursuites ne m’a pas gêné plus que ça… du moins en voiture parce qu’à pieds, c’est parfois catastrophique même s’il y a un système d’aide qui permet de fluidifier un peu nos déplacements) mais sur le côté « expressions surjouées », faut reconnaitre que si, c’est tout à fait ça. On a l’impression que ceux qui nous mentent sont en train de faire une crise d’anévrisme. Bon, j’exagère mais ne pas remarquer ceux qui tentent de nous faire avaler des couleuvres relève de l’exploit tant c’est inscrit dans leurs mimiques. Ensuite, à la décharge des concepteurs du jeu, il est dur de reconnaitre un mouvement quasi imperceptible dans un jeu vidéo et ils ont du faire le choix de montrer que le gars se retenait avec force d’aller évacuer son stress aux chiottes à chaque fois qu’il nous mentait mais ça n’en reste pas moins grotesque la plupart du temps. De ce côté, un travail sur la psychologie des perso, un boulot de profiling plus que « d’Expert » (à coup de « j’ai la preuve évidente que tu mens alors c’est même pas la peine de faire une grimace pour me le faire comprendre, je le sais ») aurait pu être plus intéressant (mais bon, là, je fantasme, j’en demande trop pour un jeu vidéo).

    Pour ma part, sur les points important, je suis tout à fait d’accord avec ce test. Sur l’aspect « caricature faciale » des perso dans les interrogatoires ou sur le côté gadget des enquêtes qui manquent singulièrement d’intérêt. Pourtant, j’ai bien aimé le jeu mais faut reconnaitre qu’on est loin, très loin de la tuerie annoncée. Un peu moins de scénarisation pour plus de liberté, c’est bien ce qui manque dans les enquêtes de L.A. Noire. Ou alors qu’on nous le vende pas comme on nous la vendu, genre le messie de l’enquête, car même si ce n’est pas un mauvais jeu, il y a forcément une déception quelque part.

  4. « On a l’impression que ceux qui nous mentent sont en train de faire une crise d’anévrisme » hahaha. Mais c’est trop ça XD.

    « mais bon, là, je fantasme, j’en demande trop pour un jeu vidéo »: Justement non, il faudra bien un jour que les concepteurs arrivent à nous faire quelque chose qui tienne la route psychologiquement et intellectuellement parlant. Et sur L.A Noire, le plus rageant, c’est qu’il y avait clairement le potentiel…

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