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Six ans après Bioshock et trois ans après Bioshock 2, Irrational Games ressuscite la franchise de FPS avec le très attendu Bioshock Infinite. Comme son nom l’indique, s’il s’agit d’un Bioshock dans la forme, le fond est totalement différent et troque les profondeurs de Rapture avec les hauteurs vertigineuses de Columbia, pour un voyage qu’aucun joueur n’oubliera de sitôt.

Bioshock Infinite commence d’une façon qui fera forcément tiquer les joueurs de Bioshock : non pas par un crash d’avion, mais par… un phare. Mais les similitudes de départ s’arrêtent là : à l’inverse de Jack, héros malgré lui (et passablement muet) du premier jeu, Booker DeWitt, mercenaire bavard d’Infinite, ne descend pas dans les confins de l’océan… mais s’élève dans le ciel. Quelques instants après avoir quitté le plancher des vaches, il atterri à Columbia, cité au-dessus des nuages où les rues se modulent au gré des plateformes volantes. Les horaires des magasins correspondent à leurs heures d’amarrage et l’ambiance, très festive, fleure bon l’insouciance du début du XXe siècle… en apparence seulement. Car Columbia est une ville qui ne ressemble à aucune autre, et dans laquelle Booker n’est clairement pas le bienvenu. Il faut dire que l’ancien militaire n’est pas là par hasard : il a pour mission de libérer et de ramener à New York une jeune fille emprisonnée à Columbia par le maître des lieux, prophète autoproclamé qui a totalement endoctriné la population locale. Une mission déjà périlleuse sur le papier et qui va sévèrement se compliquer quand Booker va découvrir qu’Elisabeth, sa cible, n’est pas vraiment une demoiselle en détresse ordinaire…

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Ah, Columbia… son ciel bleu, son tramway, sa milice…

 

Autant le dire tout de suite : résumer l’histoire  Bioshock Infinite en quelques lignes est impossible pour de nombreuses raisons. D’abord parce que l’intrigue est complexe et très riche, ensuite parce que, pour cette raison, en dire trop serait carrément criminel. Mais paradoxalement, il est difficile de parler du jeu sans évoquer la richesse de son univers et de son scénario. Mais commençons par le début.

Un titre contemplatif

L’un des premiers éléments avec lequel on est confronté dans Bioshock Infinite, c’est la beauté de ses environnements : si la modélisation des personnages ne paie pas vraiment de mine – détails pas particulièrement poussés, nombre limité de modèles de visages – la ville de Columbia entraîne immanquablement un véritable « effet wahou » dès les premiers instants de sa découverte. Clairement, l’équipe d’Irrational Games a gardé la recette qui avait fait le succès de Bioshock : considérer la ville comme un personnage à part entière. A l’instar de Rapture, Columbia est vivante et foisonnante de détails. Les premières heures de jeu, il vous sera impossible de ne pas vous arrêter à chaque coin de rue pour explorer et écouter les conversations… ça sera également l’occasion de récolter les premiers voxophones, ces enregistrements – au nombre de 80 dans le jeu – qui racontent de petites histoires dans la grande, et permettent de comprendre bien des clés de l’univers du jeu. Et puis, Columbia évolue au fil des événements, se transforme, et se redécouvre un grand nombre de fois, tant et si bien que vous vous retrouverez, sans vous en rendre compte, en train de visiter une nouvelle fois des endroits déjà explorés pour être sûrs de ne pas en perdre une miette.

L’exploration des environnements augmente d’ailleurs considérablement la durée de vie du titre : comptez une douzaine d’heures en mode normal si vous cherchez à percer tous les mystères de Columbia. Une durée de vie qui chute facilement aux alentours de huit heures pour qui esquivera les escapades touristiques, mais soyons honnête, rusher un tel jeu est sans intérêt, si ce n’est criminel. On notera néanmoins que les explorateurs les plus chevronnés  seront également ceux qui se heurteront potentiellement le plus aux quelques soucis de level design du titre : car si Infinite contient très peu de bugs de collision et autres problèmes du genre, il a le défaut de ne pas verrouiller certaines zones que le joueur n’a pas besoin de connaître à l’instant T. Ainsi, dans certaines situations, on se retrouve à explorer et piller joyeusement un coin qui deviendra le lieu d’un combat quelques minutes plus tard… avec le sentiment que quelque chose cloche un peu. De même, lors de la dernière heure de jeu, un glich facile d’accès permet de découvrir le lieu du combat final avant l’heure, et d’y rester coincé : seule solution alors, revenir au point de contrôle précédent, juste avant un combat. On ne va cependant pas se lamenter sur ce point de détail, finalement très minime étant donnés les vastes environnements du titre, mais mieux vaut prévenir tout de même.

Le SongBird... ami ou ennemi ?
Le SongBird… ami ou ennemi ?

 

Enfin, évoquons l’ambiance générale et l’atmosphère du jeu pour répondre à la question que certains se posent sans doute : Bioshock Infinite fait-il peur ? Tout dépend de ce qu’on entend par là : clairement, le titre n’est pas de ceux qui vous feront bondir de votre siège et crier toutes les 5 minutes. Néanmoins, il se dégage de Columbia une atmosphère qui peut être inquiétante et mystérieuse, même si on est bien loin de l’ambiance glauque et claustrophobe de Rapture, où les bruits des Big Daddy résonnaient dans les tunnels sombres donnant directement sur les fonds marins. Le fait que l’action de Columbia se passe en partie à l’air libre minimise cette oppression, mais ce n’est pas la seule raison : il faut aussi compter sur la présence quasi-constante d’Elizabeth, qui intervient pas mal et détend l’atmosphère. Finalement, les moments les plus tendus du jeu sont ceux où elle n’est pas auprès de Booker… et ça, les concepteurs du jeu l’ont bien compris !

Une jouabilité accessible…

La prise en main ne sera pas difficile pour les joueurs ayant déjà joué aux premiers Bioshock : après quelques combats, les automatismes reviennent, car la mécanique est la même. D’un côté, on transporte deux armes à feu en même temps, en plus d’une arme de corps-à-corps – qui est également le Grappe-Ciel, nous y reviendrons – tandis que, de l’autre, on utilise les fameux pouvoirs, acquis non plus à l’aide de Plasmides comme à Rapture, mais à l’aide de Toniques. Néanmoins, le résultat est le même, et les pouvoirs, au nombre de 8, sont d’ailleurs plutôt similaires à ce qu’on aura pu voir dans les jeux précédents. Si la visée manuelle peut éventuellement poser quelques problèmes au début, en particulier sur consoles, la maîtrise se fait malgré tout rapidement et naturellement, dès l’acquisition des premiers Toniques : ces derniers dynamisent énormément le gameplay et donnent vite au joueur un sentiment de puissance et de fort potentiel dans les gunfights. De fait, même sans forcément être un as de la précision, la combinaison des armes traditionnelles et des pouvoirs permet de se sortir de la plupart des situations.

Autre élément à souligner dans le gameplay, la présence d’un moyen de locomotion inédit : en effet, si Booker et Elizabeth utilisent des navettes volantes pour circuler entre les différents quartiers de Columbia, il leur arrive également de s’accrocher directement aux rails des tramways volants. Pour ce faire, ils utilisent un Grappe-Ciel, qui sert également à Booker pour cogner les ennemis.

Les Handy Men sont ce qui se rapproche le plus des Big Daddy en termes de menace.
Les Handy Men sont ce qui se rapproche le plus des Big Daddy en termes de menace.

 

S’agripper aux rails permet d’aller vite et d’être plus difficile à atteindre par les ennemis : c’est également le seul moment du jeu où est proposé un système de visée automatique qui permet de verrouiller une cible pour lui tirer dessus. Si cette méthode d’attaque peut sembler déroutante de prime abord, elle se maîtrise très vite et offre un nouveau point de vue et de nouvelles sensations très grisantes en combat… sans compter que pour certaines batailles, opter pour cette technique peut être particulièrement salvateur.

… pour le plus facile des Bioshock ?

Si les deux premiers volets de la franchise offraient de nombreuses phases d’affrontement corsées, notamment contre les Big Daddy et les Big Sister, et des combats prenant des tournures stratégiques dans le but de protéger une Little Sister en plein prélèvement d’Adam, Bioshock Infinite revoit sa copie sur ce point. Certes, Booker est accompagné durant la quasi-totalité de son périple par Elizabeth, mais cette dernière s’avère être bien loin de la Petite Soeur vulnérable et fragile, même si on est souvent tenté de faire un parallèle entre les deux. En tout cas, en combat, Elizabeth n’a non seulement pas besoin d’aide, mais vous est, en plus, d’un secours difficilement contestable : si elle n’attaque pas les ennemis, elle se charge néanmoins de vous fournir en munitions et potions.  Du coup, mourir est chose rare, d’autant qu’Elizabeth est également capable d’amener des armes et des abris dans les zones de combat – pourquoi, comment, vous le découvrirez vous-même. Au final, seules quelques rares confrontations vous poseront éventuellement problème… ou pas, puisque le système de repop permet de revenir dans la zone sans condition particulière, si ce n’est celle d’être délesté de quelques deniers. Et étant donné que l’argent traîne partout dans Columbia, ça n’est pas vraiment une grosse perte.

Robert et Rosalind, un duo aussi drôle de mystérieux.
Robert et Rosalind, un duo aussi drôle de mystérieux.

 

Du coup, les amateurs de défis ne s’attarderont pas sur le mode normal, et passeront d’emblée en difficile, voire en mode 1999 – en référence à la date de sortie du jeu System Shock, premier titre d’Irrational Games. A noter que ce mode n’est normalement proposé qu’après avoir terminé le jeu une première fois, mais qu’il peut en vérité être débloqué avant même d’y avoir joué, en composant le Konami Code sur l’écran-titre. Là, l’expérience sera déjà nettement plus corsée.

Une expérience aux multiples facettes

Riche, agréable à jouer et follement immersif, Bioshock Infinite est l’une des expériences les plus étonnantes proposées ces dernières années dans le petit monde des FPS… peut-être même la première aussi profonde et intelligente depuis Bioshock. Si les liens entre les deux jeux sont subtils, il est néanmoins facile de mettre le doigt sur les similitudes des thèmes abordés : la propagande, l’endoctrinement, la solitude, la manipulation… sont autant d’aspects que l’on décèle aussi bien dans Bioshock que dans Bioshock Infinite. Si Bioshock 2 n’est pas non plus en reste, il reste malgré tout un épisode à part, l’effet de surprise entourant Rapture n’étant clairement plus le même.

Le paradoxe de Bioshock Infinite, c’est que s’il semble faire table rase pour offrir un nouvel univers, il laisse tout de même un étrange sentiment à ceux qui ont déjà goûté aux précédents volets : on a l’impression de découvrir quelque chose de totalement nouveau, mais également de retrouver ses marques dans un environnement qu’on connait déjà. Si cette subtilité échappera à ceux qui explorent la franchise pour la première fois, qu’ils se rassurent : l’histoire de Columbia, de Booker et d’Elizabeth recèle suffisamment de mystères pour faire cogiter n’importe quel joueur qui consentira à s’y plonger. Il pourra compter sur des personnages principaux et secondaires remarquablement écrits – mention spéciale à Robert et Rosalind, aussi drôles que mystérieux – et sur des indices qui lui permettront de tisser lui-même la toile des événements, jusqu’à un final à couper le souffle.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté...
Là, tout n’est qu’ordre et beauté…

 

Avec Bioshock Infinite, Irrational Games rappelle qu’un bon jeu vidéo est celui qui offre une immersion immédiate, du début jusqu’à la fin. Force est de constater qu’avec ce titre tant attendu, le pari est réussi : plus qu’un jeu vidéo, Bioshock Infinite est un voyage vers l’imaginaire, au-delà même de la promesse initiale. Un titre fort qui tient en haleine et qui, tout en guidant le joueur, lui offre un dénouement à la hauteur de la franchise. Une expérience rare, à savourer dans les règles, pour ne pas en perdre une seule miette.

Tags : 2K GamesBioshockBioshock InfiniteBooker DeWittElizabethIrrational Games
Audrey

Gentle Geek Audrey

Co-fondatrice et rédac’chef de GentleGeek, je suis journaliste le jour et blogueuse la nuit – les deux ne sont pas incompatibles, non non. J’aime le cinéma, les jeux vidéo, les comics et les chats. C’est déjà pas mal !

7 commentaires

  1. Testé sur ps3 cette honte. ;)
    Et la fin est controversée suivant le point de vue des joueurs.^^

  2. C’est une honte de jouer aux FPS sur consoles que si on sait pas y jouer ;)
    Pour la fin oui, j’ai vu qu’elle faisait débat… après je pense que mon avis est biaisé dans la mesure où je m’attendais à une fin comme ça (je parle de la toute, toute fin) parce qu’elle est « logique » compte tenu des précédents Bioshock, quelque part. Par contre, la partie « révélations » est quand même bluffante. Dans ce que j’ai pu lire, beaucoup de ceux qui n’aiment pas du tout la fin ne l’ont pas totalement comprise :/

  3. La fin n’arrive pas comme un cheveux sur la soupe, par conséquent elle n’est pas particulièrement frustrante ou quoi que ce soit x) (enfin c’est mon opinion)

  4. Sans trop spoiler
    On peut reprocher le twist de la facilité , le dénouement négatif (malgré la fin après le générique), une complexité d’une nature scientifique douteuse …
    On peut se consoler avec le point de vue, que toute la fin est une mise en scène métaphorique d’une certaine beauté.

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